Je viens de lire un article qui est l’interview d’une documentaliste. Excellente communication. Une bonne image, dynamique de notre métier.
Mais… mais il y est aussi écrit :
“Son rôle (du documentaliste) s’est défini en périphérie des métiers d’archiviste et de bibliothécaire et son image peine à se détacher de ses disciplines fondatrices (…).”
Et alors là… je m’insurge ! la doc “en périphérie” ?? ciel ! “Peine à se détacher” ? diable !
Il existerait donc deux métiers fondamentaux archives/bibliothécaires. Puis un petit troisième, dans l’orbite des deux autres, la doc ?? Alors que ce sont trois métiers qui traitent des documents ?
Pas du tout, mais alors pas du tout d’accord !
Car si les archives sont des données précieuses dont on avait conscience dès l’antiquité, c’est au au milieu du XIXe qu’a été théorisé l’archivistique.
Je viens d’en trouver une très heureuse définition :
“L’archivistique a une originalité propre (…). Elle applique des méthodes qui lui sont particulières, telles que des normes, des délais de conservation, ainsi que des règles de sélection des documents. Elle est, aussi, un vecteur de transformation du document en archives. Elle ne se contente pas de conserver et de classifier les documents, elle les ordonne. Cette classification logique a des implications matérielles : cadre et plan de classement, rédaction d’instruments de recherche, rédactions et publications de textes. Autrement dit l’archivistique ne participe pas uniquement à l’établissement des sources, en décantant par le tri et les éliminations, la masse documentaire, c’est également une opération de « construction de catégories (…)”(cf source 2)
Elles portaient principalement jusqu’il y a peu sur des documents “historiques” au sens propre de l’Histoire. Puis se sont ouvertes au monde de l’entreprise. L’image poussiéreuse en a été heureusement chassée par l’arrivée des TIC et du Records management.
A noter aussi que la notion de Records management n’est pas seulement l’apanage des archivistes mais aussi des documentalistes en toute normalité puisque le document va de sa naissance à sa conservation définitive. Ce qui fait d’ailleurs que les deux métiers sur ce point là se rapprochent inexorablement. D’ailleurs les deux associations professionnelles y travaillent ensemble.
Pour en savoir plus sur le Records Management, voir la définition donnée sur le portail qui lui est dédié (source 3)
Certes les bibliothèques ont elles-mêmes une ancienneté fort respectable dont la bibliothèque d’Alexandrie est un bel exemple. Plus proche de nous, nous nous souvenons tous des petits bristols qui indiquaient la richesse du fonds (certains existent encore).
Là aussi les TIC ont apporté beaucoup de changements et d’autres façons de pratiquer.
Là aussi les pratiques des bibliothécaires et des documentalistes ont de plus en plus de points en commun, à tel point qu’en Suisse l’association des uns et celle des autres n’en font plus qu’une (cf mon billet sur le sujet)
Mais en ce qui concerne la documentation, il ne faudrait pas oublier qu’elle remonte aussi au XIXe ! Dans le 3e tiers très exactement. C’est avec elle que se crée la notion de l’information. Et ce n’est pas seulement moi qui le dit :
Le projet de fonder une « science de l’information et de la documentation » spécifique s’est affirmé sous l’impulsion d’acteurs comme Pierre Larousse (1817-1875), Melvil Dewey (1851-1931), Paul Otlet (1868-1944), Jean Meyriat (1921- ). Le point de départ en a été de dissocier l’information, construction sociale et intellectuelle, de l’ensemble des objets matériels qui, en circulant, la conditionnent sans la définir. On doit aux spécialistes de cette science d’avoir posé que l’information ne circule pas (elle n’est pas un objet) mais qu’elle se redéfinit sans cesse (elle est une relation et une action). Ce projet est lié, dès la fin du XIXe siècle, au développement d’une recherche à visée industrielle et au rêve d’un savoir planétaire. Mais plutôt que tout assimiler par l’idée d’un « système d’information » (idée plus récente dont le succès est dû aux développements informatiques), ces auteurs distinguent méthodiquement entre le support, le document, l’information et le savoir : effort de distinction qu’il faut redécouvrir aujourd’hui. (Yves Jeanneret)” (cf source 4)
Quant aux liens entre les trois, ils deviennent de plus en plus étroits. La meilleure preuve en est avec l’IABD, (Interassociation Archives, Bibliothèques, Documentation) regroupant 16 associations.
Et même, tout récemment en Suisse, l’Association des bibliothécaires et l’Association des documentalistes ne forment plus qu’une seule association (cf mon billet sur le sujet)
Quant aux sciences de l’information et de la communication à proprement parler, elles sont nées au 3e tiers du XXe siècle.
C’est une large discipline dans laquelle s’intègrent naturellement nos métiers chacune à des titres spécifiques mais avec des liens parfois étroits sur certaines activités. Elle est au coeur du monde d’aujourd’hui.
Alors ? toujours “en périphérie“, toujours “en peine de se détacher” ?
Que dire de plus ? Qu’en pensez-vous ?
_________________
sources
1 – le résumé de l’article “« Documentation » : un mot, une histoire, une actualité autour d’un métier” par Jean-Philippe Accart
http://campus.hesge.ch/ressi/Numero_3_mars2006/articles/HTML/RESSI_014_JPA_Documentation.html
2 – ” Historiographie & archivistique : Ecriture et méthodes de l’histoire l’aune de la mise en archives”
http://tristan.u-bourgogne.fr/UMR5605/manifestations/07_08/08_04_24.html
3 – le portail du Records Management
http://www.records-management.fr/spip.php?article26
4 – information, SIC et Wikipédia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Information
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sciences_de_l’information_et_de_la_communication
5 – l’IABD (Interassociation archives, bibliothèques, documentation)
http://www.iabd.fr/spip.php?rubrique1
6 – la Société française des Sciences de l’Information et de la Communication
http://www.sfsic.org/
Au fil de ma recherche, j’ai été aussi intéressée par
http://www.ecogesam.ac-aix-marseille.fr/Resped/Admin/Com/SciInfCom.htm